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Contester une amende forfaitaire

La procédure de l’amende forfaitaire qui sanctionne les contraventions des 4 premières classes est entièrement automatisée. Dès lors qu’une infraction est constatée par un agent, un radar ou un appareil de vidéosurveillance, le procès-verbal est envoyé et la sanction déjà prononcée à l’encontre du contrevenant, sans que celui-ci n’ait eu l’occasion de faire valoir ses arguments devant un juge. Il est toutefois possible de contester cette amende sur certains fondements. Voici la marche à suivre.

Déterminez le motif du recours

Si vous avez reçu un avis de contravention vous accusant d’avoir commis une infraction au code de la route sanctionnée par une amende (voir "Quelles sont les infractions passibles d'une amende forfaitaire?"), sachez que vous ne pourrez pas en contester le montant. Cette amende est forfaitaire, contrairement à l’amende prononcée par un juge, laissée à l’appréciation de ce dernier. Mais il existe des recours possibles, soit parce que vous niez être l’auteur de cette infraction, soit parce que vous contestez la validité du procès-verbal (PV) ou l’existence même de l’infraction. Dans tous les cas, vous avez 45 jours pour agir (art. 529-2 du code de procédure pénale - CPP). La date limite est mentionnée sur le PV. Ce délai est ramené à 30 jours si l’amende est déjà majorée.
Attention: les modalités de contestation varient selon la situation. Vérifiez toujours la procédure et les délais indiqués sur l’avis de contravention.

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Vous n’étiez pas le conducteur

Le PV vous a été envoyé car vous êtes le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule, mais cela ne signifie pas que c’est à vous de payer l’amende. Une personne pouvait conduire, ce jour-là, votre voiture et commettre l’infraction: par exemple, un voleur ou quelqu’un qui aurait usurpé vos plaques d’immatriculation (c’est le «cas n° 1» sur l’avis de contravention) ou bien la personne à qui vous l’avez prêtée, louée, donnée ou vendue (ces hypothèses correspondent au «cas n° 2»).
Bien entendu, vous ne pourrez pas vous servir de ces excuses pour réclamer une exonération de l’amende, si l’infraction a été constatée par les forces de l’ordre au cours d’un contrôle (excès de vitesse, conduite en état alcoolique, défaut de carte grise ou de port de ceinture de sécurité, etc.). Les cas n° 1 et n° 2 ne sont donc valables que pour des infractions sans interpellation (cabine radar, PV dressé en votre absence…). D’ailleurs, si vous êtes interpellé, vous remarquerez que les cases réservées aux cas n° 1 et n° 2 sur l’avis de contravention sont barrées. Toutefois, vous aurez peut-être d’autres motifs de contestation à soulever.

Vous n’avez pas commis d’infraction ou le PV n’est pas conforme

Vous pouvez aussi demander une exonération d’amende, si vous estimez n’avoir pas commis d’infraction (vous avez pris un ticket de stationnement, mais il a glissé sous le siège) ou lorsque le PV présente un vice de forme. Pour être valable et pour faire office de preuve, celui-ci doit, en effet, respecter certaines conditions (voir Le contrôle des excès de vitesse). Si vous constatez une erreur sur le PV - mauvais numéro d’immatriculation du véhicule, heure ou lieu de l’infraction incorrects, etc. - vous pouvez contester l’amende. Sur ce dernier point, on peut s’interroger sur la légalité des PV d’infractions constatées par les nouveaux radars dits «tronçons», qui contrôlent la vitesse moyenne d’un véhicule entre deux points sur plusieurs kilomètres. La jurisprudence estime que le PV doit mentionner le point kilométrique exact de l’infraction ou des éléments permettant de le situer de manière précise (cass. crim. du 13.12.06, n° 06-82196). Or, pour l’instant, les PV des radars tronçons indiquent que le lieu de l’infraction est celui où a été réalisé le second contrôle (art. L 130-9 alinéa 4 du code de la route, CR). La réaction des tribunaux sur ce point est donc très attendue.

Lorsqu’il s’agit d’un PV dressé à la volée, vérifiez également si vous êtes dans l’un des 7 cas d’infractions visées aux articles L 121-2 et L 121-3 du code de la route pour lesquelles ce type de PV est autorisé. Par exemple, un PV ne peut pas être dressé à la volée par les autorités de police ou de gendarmerie pour un défaut de port de ceinture de sécurité ou l’usage d’un téléphone portable au volant.
Attention: certaines erreurs sont parfois considérées par les juges comme simplement matérielles et ne suffisent pas à remettre en cause la validité d’un PV. C’est, par exemple, le cas si la date notée sur le PV est incorrecte (cass. crim. du 27.1.09, n° 08-86987).

Lorsque vous contestez l’existence de l’infraction ou la validité du PV, vous relevez du «cas n° 3» prévu sur votre avis de contravention. Il est fortement conseillé, pour cette démarche, de faire appel à un avocat spécialisé.
À savoir: si vous envisagez de contester l’amende, ne la payez pas: le paiement (à ne pas confondre avec la consignation) s’analyse comme une reconnaissance de l’infraction (art. 529 du CPP) et entraîne automatiquement une perte de points, si vous en encouriez une. Vous ne pourrez plus faire de réclamation après cela.

Constituez votre dossier

Dans la pratique, les demandes d’exonération ne sont pas facilement admises. Mieux vaut réunir un maximum de preuves.

Vous êtes dans le cas n° 1

Si vous contestez l’amende parce qu’on vous a volé votre véhicule ou usurpé vos plaques d’immatriculation, joignez à votre requête le récépissé de dépôt de plainte pour ce motif. Si votre véhicule avait été détruit avant l’infraction, vous devrez fournir la copie du récépissé de prise en charge pour destruction remis par le démolisseur agréé (formulaire Cerfa n° 12514*01).

Vous êtes dans le cas n° 2

Si vous aviez prêté, loué, vendu ou donné votre véhicule, vous devez désigner le conducteur. Joignez à votre requête une copie de son permis de conduire (ou, au moins, indiquez son numéro de permis) ou une copie de la déclaration de cession.
À savoir: si vous ne pouvez pas produire ces justificatifs, ou si vous refusez de donner le nom de celui qui conduisait votre véhicule au moment de l’infraction, vous ne relevez pas des cas nos 1 ou 2, mais du cas n° 3. Vous devrez alors fournir des preuves solides de ce que vous avancez.

En cas de contrôle radar, pensez à réclamer le cliché pris par l’appareil. S’il montre qu’une autre personne conduisait, vous serez exonéré. En pratique, la photo est rarement exploitable, mais cela peut quand même jouer en votre faveur. Si l’on ne peut identifier le conducteur du véhicule, le propriétaire est certes passible de l’amende, mais il ne risque ni retrait de points ni suspension de permis (art. L 121-3 du code de la route). Pour réclamer le cliché, envoyez un courrier simple au Centre automatisé de constatation des infractions routières (Cacir). L’adresse est au dos de l’avis de contravention. Vous devez joindre la copie de votre pièce d’identité, celle de l’avis de contravention, et celle de la carte grise du véhicule.

Attention: la demande de cliché n’interrompt pas le délai de 45 jours dont vous disposez pour contester l’amende forfaitaire. Si vous comptez joindre la photo à votre requête, vous devez donc agir vite après la réception du PV.

Vous êtes dans le cas n° 3

Si vous contestez la réalité de l’infraction, demandez expressément, dans votre courrier, à être entendu par un tribunal pour convaincre l’officier du ministère public (OMP) soit de classer l’affaire sans suite, soit de la transmettre à un juge. Toutes les preuves seront bonnes à recueillir: témoignages, photos des lieux, arrêté municipal précisant la signalisation dans la rue…
Si vous cherchez à prouver que vous n’étiez pas au volant au moment des faits, sans toutefois vouloir ou pouvoir désigner le conducteur, pensez à joindre des justificatifs tels qu’une attestation de votre employeur, des tickets de carte bancaire ou de péage, des billets de transports, des notes d’hôtel, etc.
Sachez cependant que les tribunaux n’admettent que difficilement des preuves qui ne seraient ni des écrits ni des témoignages.

Envoyez la requête en recommandé

Si vous êtes dans les cas nos 1 et 2, vous devez utiliser les formulaires qui se trouvent au dos de votre avis. Si vous êtes dans le cas n° 3, exposez vos arguments sur papier libre. Pour être recevable, la requête en exonération doit être adressée par lettre recommandée avec avis de réception (LRAR) à l’officier du ministère public dont les coordonnées sont indiquées sur l’avis de contravention et être accompagnée de l’original de cet avis (art. R 49-4 du CPP). Pensez à en conserver une copie. Si vous n’avez rien envoyé, passé le délai de 45 jours, vous recevrez automatiquement une amende forfaitaire majorée.
Attention: si l’infraction qui vous est reprochée a été constatée lors d’un contrôle automatisé (excès de vitesse, feux rouge grillé) et si vous êtes dans le cas n° 3, vous devrez consigner le montant de l’amende, et joindre à votre requête le justificatif
de la consignation (plutôt que de payer par chèque, privilégiez le timbre dématérialisé ou le télépaiement sur amendes.gouv.fr, afin d’avoir un reçu). Sinon, votre demande ne sera pas recevable. Dans les autres cas, vous n’avez rien à payer.

Suivez l’avancement de votre dossier

L’officier du ministère public (OMP) à qui vous avez adressé votre requête vérifie si les conditions de recevabilité sont remplies (envoi en LRAR avec l’original de l’avis de contravention et, le cas échéant, lettre motivée et justificatif de consignation).

Si votre requête n’est pas recevable

Si votre requête n’est pas recevable, elle ne sera même pas examinée sur le fond. Un avis d’amende forfaitaire majorée vous sera envoyé, que vous pourrez aussi contester dans un délai de 30 jours. Si vous avez dû consigner le montant de l’amende pour contester, l’argent sera encaissé. Ce qui sera assimilé au paiement de l’amende, et donc à la reconnaissance de l’infraction. Vous ne recevrez alors pas de majoration.
Il est arrivé et arrive encore que l’OMP rejette une requête pourtant tout à fait admissible (si vous avez respecté les conditions posées par la loi, il n’y a pas de raison qu’elle soit déclarée irrecevable à ce stade). Ce faisant, il excède ses pouvoirs, qui ne lui permettent pas d’émettre un quelconque jugement sur votre culpabilité (seuls un juge ou un tribunal peuvent le faire). En 2012, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a d’ailleurs condamné la France pour ne pas avoir donné aux automobilistes qui se trouvaient dans cette situation un véritable accès à un tribunal (affaires Célice, n° 14166/09 ; Josseaume, n° 39243/10 et Cadène, n° 12039/08). En 2010, le Conseil constitutionnel avait lui-même estimé que l’impossibilité de saisir le juge de proximité d’un recours contre la décision d’irrecevabilité est incompatible avec le droit à un recours juridictionnel effectif (décision n° 2010-38 QPC du 29.9.10).
À savoir: une réponse ministérielle (question n° 865, JO Sénat du 20.12.12) annonce la préparation par le gouvernement d’un décret pour mettre notre réglementation en conformité avec les exigences du Conseil constitutionnel et celles de la CEDH. En attendant, si vous constatez que votre requête est abusivement rejetée, la seule solution est de saisir le juge de proximité d’une requête dite «sur incident contentieux» (art. 530-2 du CPP) qui, en principe, ne permet de contester que des erreurs formelles (calcul de l’amende).

Si votre requête est recevable

L’OMP peut vous convoquer pour procéder à votre audition. Au terme de son enquête, il décidera au choix:

  • d’abandonner les poursuites (il doit alors vous avertir et, le cas échéant, vous envoyer un formulaire vous permettant de vous faire rembourser votre consignation) ;
  • ou de transmettre le dossier au juge de proximité, qui pourra vous condamner ou vous relaxer. Celui-ci peut trancher sans même vous convoquer: c’est ce que l’on appelle la procédure de l’ordonnance pénale, que vous recevrez ensuite chez vous par LRAR et contre laquelle vous pourrez également faire un recours. Mais si l’affaire est complexe, le juge peut vouloir entendre vos arguments. Vous serez alors invité à comparaître. Vous pourrez vous rendre à l’audience seul ou avec un avocat.

Caroline Mazodier

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