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Troubles de voisinage: préservez votre environnement contre les nuisances

Les atteintes à la jouissance du droit de propriété peuvent être aussi nombreuses que variées. De «A», comme antenne-relais, jusqu’à «R», comme réseaux électriques, comment se défendre afin de protéger au mieux son cadre de vie?

Construction d’un immeuble, implantation d’une éolienne, pollution générée par une usine, aménagement d’une bretelle d’autoroute… autant d’atteintes à l’environnement que peuvent être amenés à subir les riverains, qu’ils vivent en ville ou à la campagne. Des nuisances d’autant plus difficiles à contrer qu’il s’agit d’un projet public ou d’une grosse opération privée - a fortiori si un lobby industriel est en jeu -, dépassant le cadre des sempiternels problèmes de voisinage entre particuliers. Bien que le risque d’un scénario de type pot de terre contre pot de fer soit avéré, il ne faut pas, pour autant, renoncer à agir.

Antenne-relais

L’implantation d’antennes-relais sur le toit ou à proximité d’habitations par les entreprises de téléphonie mobile est souvent mal vécue par les riverains, inquiets de leur impact possible sur la santé

D’où un nombre significatif de litiges. Comment obtenir l’enlèvement d’une antenne, lorsque l’opérateur a, par ailleurs, respecté à la lettre la réglementation? Car réglementation il y a: l’opérateur doit obtenir une autorisation administrative ad hoc, et il doit aussi respecter des normes maximales d’exposition aux champs électromagnétiques fixées par les pouvoirs publics (décret n°2002-775 du 3.5.02).
Le démantèlement de l’installation a toutefois été admis par les juges, alors même que l’opérateur était en règle. Le risque sanitaire - autrement dit l’incertitude sur l’innocuité d’une exposition aux ondes émises par des antennes-relais -, a en effet été considéré comme constituant un trouble du voisinage par les tribunaux (pour une illustration, CA de Versailles, du 4.2.09, n°08/08775). Ce qui revient à faire application du principe de précaution. Mais ce principe est parfois battu en brèche par les tribunaux (CA de Chambéry, du 4.2.10, n°09/00731), alors que les scientifiques restent divisés sur la question de la dangerosité des antennes-relais. Le débat est donc loin d’être clos, d’autant qu’il s’est complexifié, sur le terrain procédural, avec la remise en cause de la compétence même du juge judiciaire au profit de celle du juge administratif, dans une affaire où il était mis en avant que le litige était relatif à une autorisation comportant occupation du domaine public (CA d’Angers, du 24.2.10, n°09/00645).
La plainte visant une antenne-relais peut aussi se fonder sur le préjudice visuel, là encore considéré comme un trouble du voisinage. Encore faut-il pouvoir apporter la preuve d’une nuisance importante. Le préjudice subi ne peut se réduire à une simple perte d’ensoleillement et de vue, ou encore se fonder sur le caractère inesthétique du pylône. Le trouble visuel est plus facilement indemnisé au titre de la perte de valeur qui en découle pour le bien, évaluée par un expert. À l’instar de ce propriétaire d’un appartement avec terrasse aménagée dont la vue, du fait de l’antenne, avait perdu une grande partie de son attrait (CA de Paris, du 7.1.04, n°2003/02301).

Assainissement

Les problèmes peuvent d’abord survenir à l’occasion de constructions nouvelles

Cas typique: des travaux de drainage sont prévus sur une parcelle voisine d’habitations existantes, bordée d’un cours d’eau, en vue de la construction d’un lotissement. Le promoteur a l’intention de faire passer des conduits d’eau sous le jardin. Comment l’en empêcher? Un terrain humide peut nécessiter des travaux de drainage ou d’assèchement. Sans doute le promoteur entend-il bénéficier de la servitude légale dite «d’écoulement» (art. L.152-20 du Code rural et de la pêche maritime). Là où il fait fausse route, c’est que ce texte interdit expressément le passage de conduits d’eau en présence d’une habitation, et même d’un jardin ou d’une cour attenants. Au moindre commencement de travaux, il faudra engager une action en référé devant le juge.

C’est parfois le réseau existant qui pose problème

Ainsi, dans certaines communautés urbaines, y compris assez importantes, des phénomènes de refoulement provenant des canalisations créent des nuisances olfactives à l’échelle d’une rue, d’un pâté de maison ou même d’un quartier.
Que faire, face à la fréquente inertie de la mairie?
Il s’agit manifestement d’un problème d’entretien du réseau public d’assainissement. En cause, l’entreprise gestionnaire. C’est elle qu’il faut alerter, en demandant au besoin ses coordonnées à la mairie. En cas de fin de non-recevoir, s’adresser au délégué départemental du médiateur de la République peut faciliter les choses. L’ultime recours est une action devant le tribunal administratif sur le terrain de la responsabilité résultant des dommages liés au fonctionnement d’un ouvrage public. Avantage pour la victime: la faute, présumée, n’a pas à être prouvée.

L’évacuation des eaux usées est aussi une source fréquente de litiges

Libre au propriétaire d’un terrain traversé par un cours d’eau de s’en servir, pour irriguer ses terres par exemple. Seulement, il doit le rendre à la sortie de sa propriété «à son cours ordinaire» (art. 644 du Code civil). Une société qui déversait ses eaux usées dans une rivière, ce qui avait eu pour conséquence de la polluer et de porter préjudice aux riverains, a ainsi été condamnée à installer une station d’épuration (cass. civ. 3e du 12.2.74, n°72-14671).

Autoroute

Un projet d’autoroute ou de rocade à proximité d’une maison de famille est un cataclysme auquel il est très difficile de résister

Vous pouvez faire entendre votre voix à plusieurs stades du projet. Tout d’abord lors du débat public lancé en guise de préalable par le préfet, qui dure plusieurs mois. C’est l’occasion de faire valoir votre point de vue sur le futur tracé, tout en vérifiant qu’il s’inscrit dans le respect des règles, notamment celle qui oblige à maintenir une distance de 100 mètres minimum entre l’habitation et l’axe de l’autoroute (art. L.111-1-4 du Code de l’urbanisme). Mais autant ne pas se faire d’illusion: à l’issue du débat, le projet est rarement modifié de fond en comble. Des études sont ensuite menées pour déterminer le tracé en fonction des contraintes techniques, environnementales et économiques. On entre alors dans la phase de l’enquête publique, durant laquelle les riverains sont invités à s’exprimer sur le projet, pris sous tous ses aspects, environnementaux, économiques et sociaux. Pour avoir plus de poids, il est conseillé d’intégrer une association préconstituée, voire d’en créer une pour l’occasion. C’est un décret en Conseil d’État qui va déclarer les travaux d’utilité publique. Il n’apprécie pas l’opportunité du tracé, mais exerce un contrôle sur l’utilité publique de l’opération d’expropriation.
À supposer que ce projet soit irréversible, il s’agit d’obtenir une indemnisation: bruit, dépréciation du bien, vue gâchée, autant de préjudices qui ne sont pas toujours bien compensés. L’intérêt général est, en effet, toujours considéré comme supérieur aux intérêts particuliers, et le versement de dommages et intérêts n’est pas systématique. Encore faut-il que les sujétions engendrées par le tracé de l’autoroute soient excessives au regard de celles que sont normalement censés supporter les riverains. Il en a, par exemple, été jugé ainsi dans une affaire où le préjudice sonore, esthétique et la perte de valeur vénale du bien avaient été simultanément pris en compte (CE du 26.4.89, n°71202). Par ailleurs, un paramètre est systématiquement intégré par les juges: la distance qui sépare l’autoroute de l’habitation.

Avions

L’augmentation du trafic aérien cause aux riverains des nuisances croissantes. Peut-on vraiment y remédier?

Il est hasardeux, pour ne pas dire illusoire, d’assigner un aéroport en justice. Une action judiciaire a très peu de chances d’aboutir. Les riverains sont censés avoir acheté leur logement en connaissance de cause, lorsque l’aéroport existait déjà. Ainsi, il a été considéré que seuls les riverains d’Orly installés avant le 31mai 1954, date à laquelle la décision d’étendre l’aéroport avait été prise, pouvaient obtenir réparation des troubles occasionnés par un trafic aérien plus important (cass. civ. 2e du 19.11.97, n°96-12416).
Faire sanctionner une compagnie aérienne qui contreviendrait aux règles - en termes de créneaux horaires, par exemple -, est plus efficace. Il faut alors saisir l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (Acnusa), ce qui suppose de passer par l’intermédiaire d’une association de défense des riverains. Cette autorité administrative, censée constater les nuisances, a le pouvoir de dresser des procès-verbaux et de prononcer des peines d’amende à l’encontre des compagnies, notamment si elles n’ont pas respecté les contraintes de vols auxquelles elles sont soumises (art. L. 227-4 du Code de l’aviation civile). Il est également possible de bénéficier d’aides pour réaliser des travaux d’isolation phonique, à condition que le logement soit situé dans le périmètre d’un plan de gêne sonore, ou PGS (art. L.571-15 du Code de l’environnement). Ce dispositif, financé par une taxe sur les nuisances sonores aériennes payée par les compagnies, a été revu à la hausse pour les riverains des aéroports concernés (Orly, Roissy, Bordeaux, Lyon, Marseille, Mulhouse, Nantes, Nice, Strasbourg, Toulouse et dès 2011, Le Bourget et Beauvais)*. Il ouvre désormais droit à une aide à hauteur de 95% du montant des travaux engagés, contre 80% auparavant (décret n°2009-647 du 9.6.09). À condition de faire une demande groupée, c’est-à-dire émanant d’au moins cinq propriétaires de maisons situées dans la même commune, ou du syndic de l’immeuble pour une copropriété. Toutefois, cette aide ne peut pas dépasser un plafond fixé en fonction des caractéristiques du logement et de la zone du PGS dans laquelle celui-ci se trouve situé (art. R.571-66 du même Code). La demande est à adresser au gestionnaire de l’aéroport dont on est riverain.
Les aéroclubs, enfin, qui génèrent eux aussi des nuisances, sont astreints à des normes spécifiques en matière de bruit et de trafic. Prises à l’échelle départementale, elles sont moins sévères que celles applicables aux grands aéroports.
Si elles ne sont pas respectées, il est conseillé de s’adresser d’abord à la Direction départementale de l’équipement (DDE). Celle-ci vérifiera que la réglementation est bien respectée. Si ce n’est pas le cas, une des solutions est de passer par une association de riverains en vue de saisir la Commission nationale de prévention des nuisances (CNPN), l’instance officielle en charge d’instruire les dossiers d’infractions constatées. Là encore, il ne sera pas possible d’obtenir réparation du préjudice subi à partir du moment où l’aéroclub existait déjà lors de l’achat de la maison.

Chantier

Certains chantiers peuvent s’accompagner de travaux lourds - restructuration d’un hôtel, par exemple -, ce qui occasionne des nuisances pour les résidents de l’immeuble mitoyen. Quelles solutions préconiser pour réduire autant que faire se peut la gêne?

Au préalable, il faut vérifier que les travaux sont bien faits dans les règles. Même s’ils sont d’ordre privé, s’ils touchent à la structure de l’immeuble, ils doivent avoir fait l’objet d’une déclaration, voire d’une autorisation en mairie. Par ailleurs,
il faut se référer à l’arrêté préfectoral ou communal qui prévoit en général des restrictions aux
horaires des chantiers, sachant que des dérogations peuvent
être obtenues. Si le chantier n’est
pas autorisé ou si les horaires sont malmenés, il faut en référer au commissariat ou à la préfecture de police. Dans tous les cas, la surveillance du chantier relève du pouvoir de police: une machine non conforme au niveau acoustique pourra être mise provisoirement à l’arrêt. Si le bruit est excessif, le plus simple est de s’adresser au service d’hygiène et de santé de la mairie. Un agent assermenté, équipé d’un appareil homologué de mesure du bruit, sera alors dépêché gratuitement sur place.
Néanmoins, alors qu’il est une source de nuisances, un chantier constitue une gêne que les riverains sont censés supporter en milieu urbain. Les juges se montrent relativement sévères avant de décider qu’il s’apparente à un inconvénient anormal du voisinage. Entrent en ligne de compte, notamment, l’âge de la victime et son statut (un écrivain célèbre, perturbé dans son activité de création du fait d’un lourd chantier, a ainsi pu être indemnisé).

Enseigne lumineuse

Une enseigne lumineuse qui clignote toute la nuit... Une gêne mineure en apparence, mais qui peut vite tourner au cauchemar. Est-il possible d’obliger son propriétaire à l’éteindre?

Lorsqu’une enseigne est installée en façade d’immeuble, le propriétaire du magasin est supposé avoir obtenu les autorisations nécessaires. Auprès de la copropriété d’abord, et de la mairie ensuite, sachant qu’un règlement local de publicité peut imposer des restrictions spécifiques. Si le règlement de copropriété contient une clause à ce sujet - il ne peut, pour autant, interdire totalement l’apposition d’enseignes -, celle-ci doit également être respectée. À supposer qu’elle soit régulièrement mise en service, une enseigne, a fortiori si elle est lumineuse, est source de gêne pour les voisins. Une action en référé au tribunal pourra permettre d’obtenir l’extinction des lumières à certaines heures, voire la suppression totale de l’enseigne. Aux juges d’apprécier si le trouble subi est anormal. La réponse est affirmative dans le cas de l’enseigne lumineuse d’une pharmacie continuant de fonctionner en dehors des heures d’ouverture et des nuits de garde (CA de Douai, du 12.9.02, n°01/00322).

Éoliennes

Lorsque la municipalité décide d’accepter l’installation d’éoliennes d’une hauteur de 12 à 25 mètres sur son territoire, cela ne passe pas inaperçu. Ce n’est pourtant pas une fatalité.

Dès que le projet est évoqué, il faut réagir: constituer une association entre voisins concernés permet de prendre les devants en alertant les habitants de la commune et l’opinion publique. C’est aussi le moyen de livrer bataille auprès de l’administration, avant qu’elle ne délivre son autorisation. En effet, l’installation d’un mât de plus de 12 mètres de hauteur est subordonnée à l’obtention d’un permis de construire (art. R.421-1 et R.421-2 du Code de l’urbanisme). Faire réaliser une contre-étude d’impact en parallèle de celle menée par le promoteur d’éoliennes pour pouvoir déposer le permis de construire est une riposte qui peut s’avérer efficace.
Pour autant , la partie n’est pas perdue si le permis est finalement accordé. Il est toujours possible de l’attaquer devant le tribunal administratif, ce dont ne se privent pas les associations de défense de riverains. Toutefois, cette démarche ne peut être conduite que si l’association a été enregistrée à la préfecture avant le dépôt du permis. Le risque pour la sécurité est souvent
mis en avant. Le juge a ainsi été amené à considérer que l’administration avait commis une erreur manifeste d’appréciation au regard des impératifs de sécurité publique en autorisant, à 300 mètres d’une ferme habitée et à 500 mètres d’un hameau, l’implantation d’éoliennes d’une hauteur de 120mètres, avec des pales d’un diamètre de 70mètres (CE du 27.7.09, n°317060 et318281). À noter que les conditions d’implantation des éoliennes, considérées désormais comme des «installations classées pour la protection de l’environnement» (ICPE), ont été durcies par la loi dite «Grenelle II» (n°2010-788 du 12.7.10): il faut respecter une distance de 500 mètres entre l’implantation de l’éolienne et une zone d’habitation.
La gêne visuelle est également un motif retenu par les tribunaux (CE du 15.4.05, n°273398).
Quant à la gêne sonore produite par les infrasons, les installations sont censées répondre à des valeurs limites d’émergence du bruit par rapport au bruit ambiant, telles qu’elles sont définies par le Code de la santé publique. Un projet de norme de mesurage du bruit des éoliennes est en cours d’élaboration à l’Afnor.
De son côté, la Cour européenne de justice a eu l’occasion de se prononcer sur les nuisances sonores générées par les éoliennes: elle a considéré que leur niveau ne dépassait pas les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (CJCE du 26.2.08, n°37664/04).

Panneau publicitaire

Les panneaux publicitaires peuvent s’avérer une source de rémunération non négligeable pour une copropriété. Mais ils ont aussi pour conséquence de défigurer les façades d’immeuble. Les copropriétés voisines peuvent-elles s’opposer à une telle installation?

Il faut vérifier si l’immeuble concerné est en accord avec la réglementation. La pose d’un panneau publicitaire est soumise à déclaration préalable en mairie. Des impératifs stricts sont aussi à respecter (art. R.581-1 et s. du Code de l’environnement). S’agissant d’un panneau publicitaire implanté directement sur un support existant, sa dimension autorisée varie en fonction de la taille de la commune. Si la copropriété se situe dans une ville de plus de 10 000 habitants, le panneau ne doit pas dépasser 16mètres carrés de surface ni s’élever à plus de 7,50 mètres au-dessus du niveau du sol. La mairie délivre des renseignements sur l’existence éventuelle d’un «règlement local de publicité» applicable à la commune. Dérogatoire par rapport aux règles du Code de l’environnement, il impose nécessairement des mesures plus contraignantes (art. L.581-14 tel que modifié par la loi Grenelle II).

Panneau solaire

Un voisin agriculteur qui s’équipe de panneaux solaires au sol peut-il ainsi librement défigurer les alentours?

L’installation de panneaux solaires au sol est réglementée. Les contraintes varient en fonction de la puissance, de la hauteur et de l’implantation des panneaux (décret n°2009-1414 du 19.11.09). Aucune formalité n’est requise, sauf en secteur protégé, pour l’installation de panneaux voltaïques d’une «puissance crête» inférieure à 3kilowatts, et d’une hauteur au sol inférieure à 1,80mètre. S’agissant d’une entreprise agricole, il y a fort à parier que les panneaux sont d’une puissance et d’une hauteur supérieures. Une déclaration préalable en mairie est alors nécessaire. À défaut, la démolition de l’installation pourra être ordonnée par le juge. Mais si l’installation a été faite dans les règles, il reste, bien sûr, toujours possible d’agir en faisant valoir un trouble anormal de voisinage, en l’occurrence la gêne esthétique occasionnée.

Pollution

Lorsqu’un terrain situé en bordure d’un cours d’eau est régulièrement pollué par l’usine de fabrication de papier installée de l’autre côté de la rivière, quels sont les recours des riverains?

La première démarche est d’alerter la préfecture et simultanément la Dreal (direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement), dépendant du ministère de l’Environnement et dotée d’un service d’inspection. Cela ne vous empêche pas de porter plainte auprès du procureur de la République. En tant que voisin d’un terrain pollué, vous pouvez également demander réparation du préjudice subi au tribunal de grande instance. À ce stade, il est utile pour se défendre de se rapprocher d’une association de protection de l’environnement. La réparation s’apprécie sur le terrain de la faute en engageant la responsabilité de l’usine, ou, indépendamment de toute faute, sur la base du trouble anormal de voisinage. Attention: il n’appartient pas au juge judiciaire d’ordonner la fermeture de l’établissement, en particulier s’il s’agit d’une installation classée en situation administrative irrégulière.

Porcherie

Les entreprises d’élevage de porcs établies en lisière de village ou de bourg sont à l’origine d’odeurs pestilentielles, sans compter le bruit. Comment réagir?

La porcherie, dès lors qu’il s’agit d’une grosse entreprise d’élevage, relève certainement de la législation sur les installations classées pour la protection de l’environnement. Cette notion s’applique plus globalement aux activités agricoles, industrielles ou artisanales présentant des risques d’explosion, de rejets toxiques, de pollution de l’air, ou tout simplement susceptibles d’engendrer des nuisances sonores. Selon leur taille et leur nature, elles sont soumises à simple déclaration ou bien à autorisation administrative. En premier lieu, il faut s’assurer en mairie que la procédure a bien été respectée. Sans doute l’installation de l’éleveur était-elle conditionnée à une autorisation. Laquelle, même après avoir été accordée, peut encore être attaquée en arguant, par exemple, de l’insuffisance de l’étude d’impact par rapport aux nuisances.
L’éleveur peut aussi se retrouver contraint de réaliser dans son local les aménagements qui s’imposent en vue de faire cesser le trouble. Une porcherie a ainsi vu son activité suspendue le temps d’effectuer les travaux. L’installation ayant été autorisée, il n’était pas dans le pouvoir du juge judiciaire d’ordonner la fermeture de l’activité (CA de Montpellier, du 12.3.02, n°2000/05466). L’éleveur peut également être condamné à verser des dommages et intérêts au riverain pour le préjudice subi au titre d’un trouble anormal de voisinage. À condition que l’installation de l’entreprise soit postérieure à l’achat du bien subissant les nuisances, en application de l’article L.112-16 du Code de construction et de l’habitation. Dans le cas contraire, ce recours serait fermé.

Réseau électrique

Un poteau électrique implanté au fond du jardin, une ligne à haute tension à quelques mètres d’une habitation... Comment contrer de tels projets?

S’agissant des pylônes, vous pouvez faire valoir les inconvénients que son installation entraînerait pour vous lors de l’enquête publique. Une procédure de déclaration d’utilité publique préalable, indispensable à la délivrance d’une concession à un distributeur d’énergie, est en effet engagée. Quand le préfet a pris un arrêté instituant la servitude publique (décret n°70-492 du 11.6.70), il devient très difficile de la contester, sauf à l’attaquer devant le tribunal administratif. Bon à savoir: l’implantation d’un pylône est impossible si votre propriété est clôturée par un mur ou un muret (art. 12 de la loi du 15.6.1906). Si le pylône a été installé sans aucune autorisation, il s’agit d’une voie de fait, et le juge judiciaire est compétent pour ordonner sa démolition, ainsi que le versement d’indemnités.
Le pylône est implanté dans les règles: le gestionnaire du RTE (Réseau du transport d’électricité) est censé indemniser le propriétaire de son préjudice visuel. Des mesures peuvent être proposées comme la plantation d’arbres, à condition que la propriété soit située dans une bande de 200mètres autour de l’ouvrage. Si la distance est supérieure, il faut passer devant une commission «d’évaluation amiable du préjudice visuel»: instaurée à l’échelon départemental, elle est créée par arrêté préfectoral.
Quant aux projets d’implantation de lignes à haute tension à proximité des habitations, il faut avoir conscience que les riverains sont relativement impuissants face à ce qui constitue, là encore, une prérogative de la puissance publique. Seule marge de manœuvre, demander une indemnisation du fait de la servitude générée par l’installation d’une ligne à haute tension. Cette servitude s’étend sur un rayon de 30 mètres autour des pylônes - 40 mètres dans le cas d’une ligne à très haute tension, soit au moins 350 000volts -, et par une bande calculée le long des câbles (décret n°2004-835 du 19.8.04). Dans ce périmètre, toute nouvelle construction est interdite. À ce titre, vous pouvez prétendre à une indemnisation. L’octroi de dommages et intérêts suppose de justifier d’un préjudice direct, matériel et certain. Ouvrent aussi droit à indemnisation une gêne sonore engendrée par le déplacement d’un pylône ou une installation obligeant à couper un arbre dans votre propriété. Mais le préjudice esthétique ou la baisse de la valeur du terrain ne sont pas pris en compte. C’est ce qu’a décidé la Cour suprême dans un arrêt, toujours d’actualité (cass. civ. 3e du 16.1.79, n°77-70377).

Marianne Bertrand

* Le dispositif des aides pour les logements situés en zone de PGS devrait être élargi en 2011 aux aéroports du Bourget et de Beauvais.

Troubles de voisinage: préservez votre environnement contre les nuisances

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